jeudi 16 juillet 2009

Discours de Barack Obama à Accra au Ghana le 11 juillet 2009



Le discours prononcé le samedi 11 juillet 2009 à Accra par Obama peut être considéré comme un acte fondateur pour l’Afrique à condition que les Africains se saisissent de ce discours pour transformer leur destin, destin qui est entravé par des pratiques anti démocratiques, les conflits, la corruption, la mauvaise gouvernance et l’absence de vision politique de la plupart des dirigeants africains qui se contentent de tendre la main, de recevoir l’aide publique au développement, de faire prospérer leur patrimoine personnel aux dépends de leurs pays et de leurs populations.

Le discours d’Obama peut être articulé autour de quatre points essentiels que sont la responsabilité des Africains, l’Afrique dans le monde, la bonne gouvernance et la problématique de l’aide au développement. Sur ces quatre grands thèmes le discours d’Obama est clair, sans émotion et diablement rationnel en fonction de ce que doivent être les Africains dans le monde de demain. Les Africains qui sont habitués à être caressés dans le sens du poil en sont pour leurs frais avec Obama qui n’hésite pas à leur parler en tant qu’Africain ; Obama a rappelé dans son discours que son grand père était cuisinier pour les Britanniques au Kenya et que son père a grandi en élevant des chèvres dans un petit village avant d’aller aux Etats Unis.



Le choix du Ghana est un choix explicite et volontaire. Le Ghana a été toujours le fer de lance dans la mise en place du panafricanisme à travers ses divers dirigeants comme Kwame Nkrumah. De plus, dans sa version moderne le Ghana a montré à la face du monde que l’alternance politique était tout à fait possible en Afrique, signifiant ainsi que l’avenir de l’Afrique est entre les mains des Africains ; l’Afrique est riche d’une histoire que les Africains se doivent de revisiter, ce qui favorise l’estime de soi et qui permet de forger une identité dans un monde concurrentiel hyper développé.

Le problème actuel de l’Afrique est que l’espoir des générations nées du panafricanisme a cédé le pas au cynisme et souvent au désespoir des générations actuelles. Certes la carte coloniale a favorisé les problèmes actuels et la naissance des conflits, mais la raison tient aussi essentiellement au fait que les Africains eux-mêmes ne sont pas capables de se construire une identité propre autre que celle que l’Occident a bien voulu leur accorder et dont ils se satisfont en essayant pour les dirigeants de conserver le pouvoir. De ce commentaire que l’on peut faire du discours d’Obama, essayons de voir comment il construit les quatre thèmes évoqués en amont des remarques que nous avons faites.
Obama dit aux Africains qu’il possible de vaincre la maladie, de changer fondamentalement les choses à condition de faire des efforts et d’inscrire ces efforts dans le temps. L’Amérique sera aux côtés de l’Afrique en tant que partenaire et en tant qu’amie. Le discours d’Obama est clair. Il change avec ce que l’on a l’habitude d’entendre avec la Françafrique qui souvent diffuse le message de pitié en direction des pays africains. Même si le Commonwealth a un discours un peu différent, le fond reste le même et les pays africains s’accommodent assez bien du statut de victime dont les effets se prolongent auprès des populations vivant en Afrique mais aussi auprès de la diaspora surtout française qui a beaucoup de mal à s’organiser.

L'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts, elle a besoin d'institutions fortes
Obama met l’accent sur l’organisation et sur la méthode. La réflexion est lancée : que les pays africains en fonction de leur identité à retrouver organisent les conditions de la mise en œuvre de l’organisation et de la méthode. Pour Obama, s’il est important de se libérer du contrôle d’autres nations, il est encore plus important de construire sa propre nation. D’un point de vue méthodique, Obama récuse les coups d’Etat et les changements de constitution opportunistes des dirigeants pour rester au pouvoir. L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, elle a besoin d’institutions fortes.
L’Afrique ne peut se développer seule. Elle a besoin de nombreux partenaires. Obama propose à l’Afrique de soutenir un développement qui apporte des opportunités au plus grand nombre, mais il introduit de nombreuses conditions. Si l’Amérique est prête à aider l’Afrique, Obama exige que son administration accorde plus d’attention à la corruption, aux conditions de formation et d’exercice d’une activité économique sans avoir à payer un bakchich. Pour étayer ces propos, Obama prend appui sur la réussite des Africains aux Etats Unis. Pour Obama, les Africains vivant aux Etats Unis se portent bien, ils ont le talent et l’esprit d’entreprise. Pourquoi ces Africains réussissent-ils mieux aux Etats Unis que dans leurs propres pays alors que le continent est riche en ressources naturelles ?

Pour Obama, si les matières premières et le pétrole procurent des opportunités, encore faut-il que les revenus provenant de la vente des ces produits soient investis dans les pays d’origine pour favoriser les infrastructures de base, développer une force de travail compétente et créer de l’espace pour les petites et moyennes entreprises qui favorisent l’emploi. Pour Obama, les Africains doivent être capables de se prendre en charge en développant l’agriculture grâce à une focalisation sur les nouvelles méthodes et technologiques pour les agriculteurs locaux qui favorisent la sécurité alimentaire.

L’aide n’est pas une fin en soi, l’objectif de l’assistance étrangère doit être de créer les conditions pour qu’elle ne soit plus nécessaire. Les Africains doivent être capables d’arriver à une situation d’autosuffisance alimentaire qui leur permettra d’exporter de la nourriture dans les autres pays et gagner de l’argent. Oui les Africains peuvent le faire.


La bonne gouvernance

Pour réussir, les Africains doivent être capables de créer les conditions d’une bonne gouvernance institutionnelle. Cette gouvernance doit courageusement prendre en compte toutes les identités, tribales, ethniques, religieuses et nationales en essayant de construire un mode de gestion qui mette l’accent sur le respect de la valeur humaine, sur la dignité de chacun, sur la volonté de lutter contre la corruption et de réfléchir sur une dépendance trop forte par rapport aux matières premières et minérales.

La bonne gouvernance permet d’accélérer la prospérité à travers les partenariats public/privé qui mettent des investissements dans de meilleures routes, dans l’électricité, dans le renforcement des capacités à la formation des entrepreneurs, des services financiers qui ne s’arrêtent pas aux villes mais doivent s’étendre aux zones pauvres et rurales. Il faut que l’Afrique réfléchisse que les nouvelles technologies d’avenir capables de développer l’énergie solaire, l’énergie bio thermique et les biocarburants. C’est l’enjeu fondamental qui est donné à l’Africain du 21ème siècle.


L’aide au développement

Pour Obama, l’aide au développement telle que la conçoivent les Africains n’est pas le point de référence ultime. L’Afrique, tout en travaillant avec les grands pays partenaires dont les Etats Unis, doit mettre en place les conditions de son propre développement. Après la victoire politique des indépendances, l’Afrique doit absolument savoir que les opportunités de responsabilité, de bonne gouvernance et la place de l’Afrique dans le monde ne viendront pas d’ailleurs mais des décisions que les Africains prendront, de ce que les Africains feront et de la capacité de faire naître l’espoir pour leurs peuples. Le triomphe de la justice est un élément fondamental dans cette œuvre monumentale. Dans ce triomphe de la justice, la jeunesse doit prendre toute sa place en interpellant en permanence les leaders responsables, en utilisant toute son énergie et toute son instruction pour créer de nouvelles richesses et pour construire de nouvelles connexions

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